Innovation, Logistique, Nouvelle économie
L'intelligence artificielle hybride
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1. Contexte
Il était déjà compliqué de suivre, pour la grande majorité de profanes que nous sommes, tous les termes liés aux nouvelles technologies, à commencer par comprendre ce qui se cache derrière « l’intelligence artificielle » (IA). Au-delà du mythe de voir les machines totalement indépendantes de la volonté humaine, tel que nous le présentent les films futuristes, l’IA est avant tout un outil puissant d’accélération des raisonnements mathématiques.
Structurée autour d’algorithmes toujours plus complexes et basés sur des technologies de plus en plus performantes, mais également consommatrices en énergie, l’IA est perçue dans le monde économique moderne comme un outil déterminant de compétitivité pour de nombreux aspects de gestion. Qu’il s’agisse d’optimiser les modélisations et la recherche scientifique, d’accélérer l’anticipation des commandes d’un industriel ou d’optimiser au plus juste le chargement d’un véhicule, ses applications sont désormais nombreuses.
Or, comme indiqué par sa définition même, l’IA présente également quelques inconvénients, puisqu’elle nécessite :
- Des ressources importantes pour fonctionner (notamment des serveurs très puissants selon les besoins, basés sur la technologie quantique),
- Des bases de données conséquentes pour avoir de la matière à analyser (d’où la corrélation forte avec les technologies de big data),
…et que jusqu’à présent elle était aussi fortement dépendante de la qualité, ou fiabilité, de l’algorithme sur lequel elle était conçue, c’est-à-dire du raisonnement humain qui l’avait mise en place.
Cet algorithme, alors rigide dans son interprétation par l’IA, a pour conséquence de ne pas tenir compte de tous les aléas, de situations imprévisibles ou de l’évolution des besoins. Dans certaines situations du quotidien cela n’a pas de conséquence, mais lorsqu’il s’agit d’un secteur industriel de pointe, de la fiabilité des systèmes de guidage d’un véhicule hybride ou de passation de commande de matériaux à l’international, les conséquences peuvent être désastreuses pour l’économie… et la sécurité des individus.
2. Synthèse AFT
L’Intelligence Artificielle hybride, c’est la recherche que mène de nombreux scientifiques pour faire concilier les différentes approches de l’IA afin de produire des raisonnements les plus qualitatifs possibles et au plus près d’un processus décisionnel humain, en tenant compte de l’absorption d’une quantité extraordinaire d’informations. Il s’agit donc à la fois de capitaliser sur les technologies du big data, du cloud computing, des technologies quantiques et bien sûr des différents courants de développement de l’IA elle-même.
Initialement, l’IA se construit sur un ensemble de règles et de principes établis par l’Homme afin de construire un algorithme qui puisse reprendre une logique mathématique et la pousser au maximum de ses possibilités. La grande majorité des décisions que nous prenons sont basées sur des principes simples :
Exemple : un panneau routier de circulation indique de tourner à gauche : le conducteur tourne à gauche à la prochaine intersection.
Or, cette même information, en conditions réelles, peut être altérée. Si par exemple le panneau est légèrement incliné et que l’axe du symbole ne pointe pas précisément dans la bonne direction, l’Homme est capable d’interpréter malgré tout l’information donnée. C’est cette altération qu’il s’agit de prendre en compte pour que l’IA fournisse systématiquement la meilleure analyse possible à la sortie d’une problématique complexe.
On comprend aisément que le champ des possibles en termes de micro-altérations des paramètres ou des informations à lire est donc immense. Il n’est donc pas envisageable de recenser et « coder » ces alternatives de lecture possible dans un unique algorithme. Et c’est justement sur ce plan qu’intervient la conception d’une IA hybride, qui non seulement reprendrait les techniques de lecture de l’IA empirique ou l’IA symbolique, mais capitaliserait sur toutes les situations uniques / exceptionnelles rencontrées pour qu’un arbitrage soit réalisé et que cet apprentissage soit capitalisé par l’IA.
Au-delà de l’aspect technique complexe que cela représente, cela implique également une capacité de stockage commensurable pour capitaliser chacun des apprentissages au point de pouvoir devenir autonome par la suite pour recenser toutes les situations passées et arbitrer directement sur des situations « similaires », comme le ferait l’humain.
En termes d’usage et de finalités, les possibilités pour nos sociétés de demain sont elles aussi exceptionnelles et sans limites. On entend de plus en plus parler de smart cities, de besoin de mutualiser et de collaboration entre entreprises privées et services publics. Le développement d’une technologie fiable qui tienne compte de l’ensemble des informations d’un tel système complexe à l’échelle d’une ville permettrait une gestion optimale de la signalisation (ex. : éviter les arrêts à un carrefour sans trafic pour réduire l’impact carbone, réagir à un incident et des travaux pour réorienter les usagers, etc.).
Pour des industriels et grands groupes, l’IA hybride devrait également apporter des innovations conséquentes avec une gestion optimale des performances d’un équipement comme une voiture ou de l’électroménager, des fonctionnalités d’auto-maintenance et d’alerte… Cela rejoint également le très fort développement de l’électronique à bord des véhicules, avec détection de danger, des distances, dépassements, virages, etc.
3. Perspectives pour la logistique
Pour les acteurs logistiques et transport, l’arrivée d’une telle technologie et la garantie de fiabilité des IA qui seraient mises à disposition du secteur devrait avoir des conséquences vertueuses dans l’ensemble. Dans un premier temps, il s’agit d’une optimisation conséquente des flux, notamment à l’échelle de la ville et pour tout ce qui concerne la livraison du dernier kilomètre. L’intérêt collectif permet notamment de distribuer les coûts de mise en place de cette technologie auprès d’un grand nombre d’acteurs et notamment les collectivités.
En fluidifiant la circulation, ce sont plus de trajets et plus de clients servis, tout en réduisant les coûts de fonctionnement (horaires conducteurs et énergie). Cette « meilleure gestion » des ressources logistiques devrait entre autres apporter une réponse à la sous-capacité grandissante des opérateurs face à une demande grandissante des consommateurs du e-Commerce.
Pour les grands groupes et la logistique industrielle, l’IA hybride devrait également permettre des économies sur la gestion des approvisionnements, les pertes et gaspillages d’une ligne de production, voire à terme des suggestions de mutualisation de certains processus de fabrication. Une telle avancée technologique devrait permettre un bond en avant pour une meilleure robustesse de fabrication avec un minimum de ressources, et donc augmenter la fiabilité à long terme des produits.
L’analyse des flux sur l’ensemble de la Supply Chain pourrait mettre en évidence l’impact économique réel entre une production en flux poussés et les conséquences sur les flux retours ou une meilleure valorisation des produits en « seconde main » pour basculer vers des modèles de maintenance et réparation plutôt que de fabrication seule.
Enfin, mais cela implique que la technologie soit démocratisée et économiquement accessible à tous, la mise en place de l’IA hybride sur les activités de transport, toute taille d’entreprise confondue, permettra de charger un camion avec un taux optimal de préparation, et d’organiser ses tournées en conséquence. Si les outils communiquent entre eux, ces informations de préparation peuvent être communiquées le plus en amont possible pour qu’un opérateur logistique ou un conducteur n’ait plus qu’à s’assurer de l’intégrité physique des marchandises, sans prise de risque sur le chargement ni difficulté à charger un véhicule, et sans risque d’erreur sur la prise en charge et livraison des produits.
Toutes ces améliorations possibles en reviennent cependant toujours au même aspect essentiel : le partage des données. Pour être efficace et optimale sur l’ensemble d’une chaîne d’approvisionnement, l’IA hybride devra accéder à toutes les informations, d’où la notion de serveurs multi cloud, au sein d’un grand groupe ou entre acteurs. Et sur ce plan les entreprises ne sont pas toutes au même niveau de maturité…
Définitions :
Intelligence Artificielle (IA) : c’est l'ensemble des théories et des techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l'intelligence humaine. Elle englobe donc un ensemble de concepts et de technologies, plus qu'une discipline autonome constituée.
Intelligence Artificielle empirique : cette IA s'attache exclusivement à l'observation et au classement des données sans l'intervention d'un système ou d'une théorie a priori. L’algorithme utilisé tient compte essentiellement des circonstances, des opportunités, sans faire référence à des principes arrêtés.
Intelligence Artificielle symbolique : cette IA a pour but de reproduire le raisonnement de l'Homme, modélisé par un ensemble de symboles. Cette représentation symbolique est régentée par des règles et instructions codées dans la machine par l’Homme pour guider sa prise de décision.
Intelligence Artificielle hybride : désigne une volonté de concilier la logique mathématique et les raisonnements de l'apprentissage. Il s’agit de concevoir des algorithmes qui permettront à une IA d’apprendre à apprendre et tenir compte de situations ou expériences passées pour ne pas renouveler les mêmes erreurs sur une situation donnée.
Technologie quantique : domaine émergent de la physique et de l'ingénierie, qui repose sur les principes de la physique quantique. Cette approche de la physique étudie les phénomènes fondamentaux dans les systèmes physiques, à l’échelle atomique et sub-atomique.
Big data : terme désignant les ressources d’informations dont les caractéristiques de volume, de vélocité et de variété imposent l’utilisation de technologies et de méthodes analytiques particulières et particulièrement puissantes pour créer de la valeur, nécessitant généralement des traitements parallélisés.
Smart city : ville utilisant les technologies de l'information et de la communication pour améliorer la qualité des services urbains ou réduire leurs coûts. Autres termes employés : ville connectée, cyber ville, ville numérique, communauté électronique.
Open source : une solution ou un logiciel en « open source » est un objet informatique publié sous une licence dans laquelle le titulaire du droit d'auteur accorde aux utilisateurs les droits d'utiliser, d'étudier, de modifier et de distribuer le logiciel et son code source à quiconque et à n'importe quelle fin.
Cloud : désigne les serveurs accessibles sur Internet, ainsi que les logiciels et bases de données qui fonctionnent sur ces serveurs.
Multi Cloud : il s’agit de l'utilisation par une entreprise de plusieurs services de cloud computing et de stockage de différents fournisseurs dans une seule architecture hétérogène pour améliorer les capacités et les coûts de l'infrastructure cloud.
Sources
- Article université Lyon III Jean Moulin – Intelligence artificielle : projet CNRS à Singapour
- Article Techniques de l’ingénieur – Optimiser les villes grâce à l’IA
- Article EngineeringNet – Le CNRS à Singapour lance un projet phare sur l’IA hybride
- Article Exploreur – Intelligence artificielle hybride : l’art de concilier logique et apprentissage
- Article Sciences et Avenir – A la recherche de l’IA hybride
- Article blog IBM - Intelligence artificielle et Hybrid Multi-Cloud
- Article Data Analytics Post – Le défi de l’Inria pour une IA hybride interprétable