Environnement et Développement Durable, Logistique

Menaces climatiques sur les infrastructures logistiques

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Inversons le sujet et intéressons-nous à l'impact du dérèglement climatique sur les opérations logistiques : avec les nombreux évènements qui ont impacté les infrastructures publiques et privées de ces derniers mois, les chaînes d'approvisionnement se doivent d'adapter leur organisation en conséquence pour continuer à opérer. Même si cela n'affecte que certaines régions, qu'en est-il au niveau global et quelles solutions les professionnels mettent-ils en oeuvre pour anticiper l'avenir ?

      1. Contexte

Et si nous inversions le sujet ? En effet tous les travaux scientifiques convergent à établir que les raisons du dérèglement climatique actuel sont d’origine humaine, en lien avec la période industrielle et croissance exponentielle de notre exploitation des ressources de la planète. A ce titre, de nombreux travaux sont en cours pour réfléchir à réduire notre empreinte environnementale et optimiser tant nos moyens que les flux pour les acheminer.

Mais étant donné la vitesse avec laquelle le climat se détériore dans certaines régions du monde, et l’interconnexion de tous les marchés grâce, ou à cause, de la mondialisation… est-ce que nos infrastructures logistiques ne vont pas elles aussi souffrir de nouvelles contraintes pour assurer leurs services actuels à notre société ?

Petit tour d’horizon de quelques impacts environnementaux notables de ces derniers mois qui pourraient bien changer la donne des flux mondiaux de marchandises comme de personnes…

 

      2. Synthèse AFT

Le saviez-vous ? L’océan n’est pas plat. Avec l’influence de la lune, la rotation autour du soleil, etc. le niveau des océans n’est pas strictement égal à zéro partout sur la planète. Par ailleurs, lorsque l’on décide de construire un canal, comme celui de Panama, nous n’avons pas forcément la chance d’avoir une surface place à creuser pour faire communiquer entre eux deux océans. Le choix peut-être aussi, grâce au génie scientifique de l’Homme, de construire des plans inclinés pour faire « monter » les navires sur un plateau, lui-même alimenté par des lacs artificiels.

Or, en cas de sècheresse, ces lacs artificiels sont d’autant plus fragiles et créent alors un problème nouveau : l’impossibilité pour des navires parmi les plus imposants du fret maritime de traverser. C’est actuellement le cas et le trafic y est donc fortement limité. En plus de reverser de l’eau douce vers les océans, cela affecte également les populations autochtones en termes d’accès à une eau potable, ou réduit les possibilités de pêche.

L’axe est stratégique pour le commerce mondial, notamment de produits pétroliers et dérivés, et permet d’éviter près de 4 semaines de trajet pour contourner le continent américain. Il est susceptible de créer des tensions voire des conflits sur place étant donné l’importance des lacs pour une grande partie des panaméens.

Autre exemple : la souffrance des infrastructures ferroviaires face à la hausse des températures. Que ce soit en Ile-de-France ou sur de longues distances, qui n’a pas eu l’occasion de faire face à des annulations ou retards importants, en raison des interventions nécessaires sur le réseau en cas de fortes chaleurs ? En effet, les rails n’ont pas été conçus pour des conditions extrêmes et peuvent monter jusqu’à 70°C lors d’une canicule, ce qui déforme les rails par dilatation et peut générer des accidents graves.

Pour le routier le problème est similaire puisque le bitume se ramollit avec les fortes températures (ressuage) et ça couleur noire concentre d’autant plus la chaleur. Avec ce phénomène, les véhicules emportent et déplacent une partie du liant de la chaussée ce qui la déforme davantage, la rend glissante et dangereuse pour tous les véhicules, plus particulièrement les deux-roues. Diverses études sont déjà à l’œuvre pour réduire les risques et préserver la fonctionnalité de ces différentes infrastructures, avec par exemple l’usage de chaux pour les routes et autoroutes.

Mais ces matériaux et techniques de compensation restent pour l’instant transitoires ou superficielles, avec une durée de vie limitée. S’il est bien sûr toujours possible de dérouter le trafic vers d’autres axes, ceux-ci seront probablement beaucoup plus longs et auront alors un impact environnemental (souvent très carboné) beaucoup plus fort. S’il est possible également de transvaser le fret sur des véhicules d’emport plus petit, ou vers une autre alternative modale, cela représente alors une démultiplication des manipulations, des ruptures de charge… mais également du nombre de véhicules. Cette conséquence représente alors aussi un accroissement de l’empreinte environnementale des flux logistiques, qu’il s’agisse de fret comme de passagers.

Le dernier mode de transport, tout aussi impacté par la transformation rapide du climat, c’est l’aérien, qui peut être tout aussi affecté par le mauvais état des pistes que les véhicules de transport routier, mais qui pourrait également souffrir d’autres phénomènes naturels. En effet, l’humidité de l’air ou la circulation et la puissance des vents ont une incidence notable sur la capacité des appareils à obtenir la portance nécessaire au décollage, ou au contraire, s’assurer d’atterir dans les meilleures conditions possibles. Une température de l’air plus élevée nécessite plus de distance et d’énergie pour décoller… Un autre cercle vicieux potentiel.

Bien sûr, ces températures ou incidences naturelles sur l’ensemble des infrastructures mondiales ne sont pas encore ni constantes, ni systématiques, ni heureusement simultanées sur toutes les régions économiques. Cela permet à nos économies de poursuivre leur fonctionner et de trouver des alternatives le temps que de nouvelles technologies ou solutions apparaissent pour compenser voire transformer durablement nos modes de transport.

Mais d’autres questions se posent pour être en mesure « d’absorber » ces changements comme ce qui a toujours été fait jusqu’à présent durant la période industrielle :

  • Seront-nous capables de transformer non pas un mais tous nos modes de transport durant les 2 prochaines décennies ?
  • Avec une croissance mondiale qui se poursuit toujours d’après la majorité des sources économiques, la mise à l’échelle de ces nouvelles technologies sera-t-elle possible dans le même laps de temps, sur l’ensemble de la planète ?

 

      3. Perspectives pour la logistique

Le transport représente environ un quart des émissions mondiales de carbone liées à l’énergie, sans évoquer l’impact environnemental de la conception, de la place que prennent les infrastructures ni de l’incidence sur la biodiversité. Les solutions de transport dits durables et à moindre impact environnemental sont déjà connues mais actuellement les moins usités et compétitives, dans un monde économique ultra-compétitif.

De nombreuses solutions combinées permettent de réduire l’empreinte de chacun de ces modes, si elles sont prises à bras le corps tant par les acteurs économiques, déjà fortement sensibilisés et impactés par le dérèglement climatique, que par les acteurs publics et décideurs (notamment les donneurs d’ordre).

Sur tous les continents, les politiques sont en train d’évoluer, tout comme les investissements, pour rendre plus compétitifs ces modes de transports durable et agir rapidement sur nos flux de marchandises afin de contrôler l’impact environnemental à moyen / long terme de nos émissions carbones.

Cependant, un constat semble s’imposer à tous quant à la période de transition en cours, vers une stabilisation de la hausse des températures à 2°C : il est nécessaire d’agir rapidement, d’investir très lourdement et d’appréhender la problématique du fret dans son ensemble avec un maximum d’acteurs concernés tant il s’agit d’une situation complexe. Les acteurs logistiques ont toujours su adapter leurs modèles et opérations dans un souci d’agilité et de satisfaction aux attentes client. Il s’agit ici d’intégrer un nouveau facteur de flexibilité dans la capacité à convaincre leurs donneurs d’ordre, les pouvoirs publics, mais aussi les consommateurs, que les flux doivent être repensés autrement.

La maîtrise de l’environnement global logistique et des infrastructures touche à de nombreux acteurs dont ces derniers sont tributaires et sans lesquels il ne leur sera pas possible de transformer leur activité totalement et efficacement dans un souci de durabilité. Il ne s’agit donc pas uniquement de technologies et de nouvelles énergies à intégrer dans les opérations mais aussi et surtout de comportements de consommations, de choix politiques et de mutualisation des efforts pour un avenir commun…

 

Définitions

Ressuage : méthode de contrôle non destructif qui permet de mettre en évidence des discontinuités débouchantes comme une fissure, etc. sur tout métal, céramiques et de nombreuses pièces composites. Dans le cas d’une canicule, il s’agit de la remontée de certains matériaux vers la surface, désolidarisés du reste à cause de la chaleur.

 

Sources

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